Chansons de Nicolas de la Grotte
En 1569, Ronsard, « prince des Poètes », est au sommet de sa gloire. Les Guerres de religion sévissent. Le Prince des Poètes célèbre la victoire du duc d’Anjou, futur Henri III, à Jarnac. On pourrait croire que l’heure n’est plus à « chanter d’amours ». Et pourtant c’est l’année où sort un recueil de tubes en puissance, les Chansons de P. de Ronsard, Ph. Desportes, et autres, mises en musique par N. de La Grotte, valet de chambre du Roy. Rien que des chansons d’amour, parfois lestes ! En résumé : Faites l’amour, faites-moi l’amour, pas la guerre ! Sait-on que le recueil se termine sur cet audacieux acrostiche : FOUTEZ ? 1569 sera une année érotique…
Mais le recueil s’impose aussi et surtout comme une remarquable anthologie de la chanson poétique, à chanter et à lire : quelques-unes des plus belles pièces composées par Ronsard pour ses premières inspiratrices ou pour de récentes fêtes de cour alternent avec de très belles chansons encore inédites de l’étoile montante de la cour, Philippe Desportes, une chanson de Baïf à Francine, une de Filleul, celle d’un amateur récemment disparu, Sillac, ou une chanson rustique anonyme.
Le succès est au rendez-vous. Dès 1570, des transcriptions de ces chansons pour voix seule accompagnée au luth sont réalisées par le luthiste Adrian Le Roy, interprétées devant la cour, ou dans le salon de Claude-Catherine de Clermont, comtesse de Retz. Le Roy lance le concept et la vogue de l’air de cour en dédiant à la comtesse le tout premier Livre d’airs de cour miz sur le luth (1571). Il souligne le « mérite des vers », la qualité des poésies mises en musique, « sorties des bonnes forges comme du Seig[neur] Ronsard, Desportes & autres des plus gentilz poètes de ce siècle ». Grande nouveauté dans l’édition musicale que cette promotion des textes : elle assurera durablement la vogue des chansons de La Grotte et leur valeur d’anthologie poétique, relayée pendant plusieurs décennies par de nouvelles anthologies et par d’innombrables parodies.
On se propose de restituer l’esprit de ces fêtes galantes inspirées par la poésie érotique de Ronsard : on déclinera, en partant de ces deux recueils, divers modes de mise en valeur de la poésie : déclamation, accompagnée à l’occasion d’un instrument, chant soliste accompagné au luth, polyphonie à quatre chanteurs.
Jean Vignes
Distribution
Nous pouvons présenter ce programme sous deux formules, au choix.
I. Concert-lecture :
Esther Labourdette, superius et direction musicale
Maximilano Baños, contratenor
Lisandro Nesis, tenor
Julien Reynaud, bassus
Christoph Sommer, luth
Isabelle Garnier et Jean Vignes, récitants
II. Concert-conférence :
Esther Labourdette, superius
Miguel Henry, luth
Jean Vignes, conférencier